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« Mémoires sans câble » un film de Félix Tailliez

« Je reviendrai…et vous regarderai dans le fond de la mer avec mon œil et aussi un autre œil dans cette boîte et qui ramène des images » Cdt Tailliez

ẩn những kỷ niệm  – Mémoires sans câble – Hidden Memories – In der Tiefe des Speichers

un film de Félix Tailliez

Visible sur la toile virtuelle, le film de Félix Tailliez -court-métrage de 12min et 14 sec, 14 min et 52 sec avec les « boni »- est d’une efficacité redoutable, d’une poésie enivrante et d’une rigueur mathématique.

Le titre « Mémoires sans câble », écho  du livre de son grand-père Philippe « Plongées sans câble », ainsi que l’ensemble des plans et la structure du film témoignent d’une maîtrise du langage cinématographique.

Tailliez Félix donne ici un film et non un reportage et encore moins un hommage émotif et sans critique.

Il s’agit bien d’utiliser les outils éprouvés du cinéma, tels que les plans symboles, la distanciation lors des rencontres, pour construire un récit filmé dont le spectateur ne se sent pas exclu. Bien au contraire, dès le premier plan, celui du remous de l’hélice, nous sommes dans une quête, celle de l’auteur certes et pas sans trouble, mais lui on ne le voit que de dos aux archives de la Marine, nous pouvons nous glisser à ses côtés.

Est-il possible de retrouver les plongeurs décrits avec tant d’admiration et de respect par le Cdt lors de son séjour colonial ? Est-il possible de recréer un rapport humain dans un monde qui a vieilli et surtout qui a vécu une autre histoire en se libérant du colonisateur, même si parfois il était un humaniste ou mieux, un ami ? Félix Tailliez a choisi la caméra qui seule permet de ne mettre aucun des acteurs en porte à faux, et qui n’interprète pas la parole.

La mémoire revient et sur l’écran se révèle une émotion celle du témoin qui revit une histoire ancienne, oubliée et pourtant oh combien présente dans son corps.

Le film montre bien la différence de point de vue entre le petit fils de celui qui a connu ceux qui ont vécu une expérience avec lui et ne souviennent pas et quand ils se souviennent avec ce personnage surgit tout à coup dans leur vieillesse. Il y a un échange inégal mais honnête. La force du film est de suggérer, de poser des questions et de ne pas donner de réponse.

Pas de réponse en France, peut-être pas de réponse en ex-Indochine.

Par ce film, outre une alchimie personnelle mais qui n’envahit pas l’écran, Félix Tailliez fait beaucoup plus qu’une œuvre historique ou affective, il interroge les outils de connaissance, la fiabilité des archives et la faiblesse, pourtant irremplaçable, des témoignages humains. C’est un regard sur le processus de recherche de la mémoire et sur sa construction, regard que seul le cinéma peut donner à voir à tous.

La mémoire des faits peut-elle se substituer à l’expérience des faits ?

La dernière séquence est double : elle interroge sur la nature même du cinéma et sur notre rapport à son discours. Elle évoque la dualité pascalienne de la recherche du vrai.

Mais aussi pourquoi chercher quand la réponse existe ?

Sans doute parce qu’on ne la trouve que par soi-même.

Djh

Hidden Memories / Mémoires sans câble / In der Tiefe des Speichers from Felix Tailliez on Vimeo.

ẩn những kỷ niệm / Hidden Memories / Mémoires sans câble Film documentaire de création, 15′.Productions Archipelaego – Université Bordeaux 3        5 mai 2012

Réalisateur : Felix Tailliez,  montage :Nicolas Kieffer, image : Arielle Estrada

« Un souvenir raconté par mon père me conduit à enquêter à partir du Journal de bord de mon grand-père sur les raisons qui l’ont conduit à filmer et photographier en 1952 les « Plongeurs-nus » d’une petite île du Vietnam dans le contexte de guerre coloniale. »